Je tiens à remercier Mme Lyz Roach de Toronto pour son initiative d’organiser, en plus d’une compétition « shiai » mondiale, une compétition de katas pour les judokas de plus de trente ans. Certains sont d’anciens compétiteurs, d’autres y participent pour la première fois ou presque.
Elle a osé et ce fut un grand succès que d’organiser pour ces mêmes catégories d’âges une compétition de katas femmes, hommes et mixte.
Encore une fois merci Lyz et à la Word Master Judo Association.
Aujourd’hui, c’est la Fédération internationale de Judo qui a « récupéré » cet événement. Souhaitons que l’ambiance bon enfant demeure et que cet intérêt pour ce genre de compétition soit toujours présent.
Les compétitions de katas sont évaluées par des juges qui ont une expérience personnelle, et qui sont formés pour cette tâche, ils ont « un guide écrit » à suivre élaboré et approuvé par les instances. Mais malgré tout cela il y a des écarts importants de notes entre les juges et cela apporte son lot de critiques et de déceptions, sans doute plus qu’en shiai, mais il faut espérer qu’avec le temps il y aura une certaine harmonie des notes.
Le Québec est la 1ère province au Canada qui a organisé des stages et des compétitions de katas, ainsi que participé aux stages et compétitions internationales.
Elle compte une belle brochette de champions, mais c’est un petit groupe, c’est le devoir de tous de la faire grossir.
Les katas
S’il faut toute une vie pour découvrir, maîtriser et apprécier l’ensemble des composantes du judo, quel plaisir de voir cet éventail fabuleux qui s’offre à nous à tous les niveaux et à toutes les périodes de notre vie, l’avant et l’après de la période de compétitions.
Parmi ces techniques qui composent le gokyo élargi et au-delà de ce cadre officiel, il existe une multitude de techniques qui valent la peine d’être découvertes avec la pratique des katas entre autres.
Il y a l’arbitrage qui mérite d’être abordé pour le comprendre et garder contact avec le monde de la compétition. Il y a aussi les katas qui font partie intégrante du judo dans son ensemble, il s’agit là d’une importante préoccupation que je viens partager avec vous.
Pourquoi la pratique des katas est-elle considérée comme une pratique de seconde classe, quelques fois dénigrée, snobée ou même ignorée ? Certains les pratiquent par obligation pour les examens de « dan » et s’empressent de les ranger dans un coin, d’autres préfèrent se passer de promotion ou la retarder dans l’espoir d’un « batsugun » (nombre exceptionnel de points de compétition).
Exemple : L’approche pédagogique est-elle adéquate?
La méconnaissance des katas par les enseignants est remise en cause. L’esprit mériterait d’être à revoir (en discuter lors du colloque des professeurs). La réponse n’est pas facile, mais en parler serait un premier pas.
Comme élément de solution, étant donné qu’il n’y a pas d’âge pour découvrir et pratiquer les katas, je préconise de les enseigner aux jeunes, d’autres disciplines d’origine martiale le font avec succès. Pourquoi pas nous? Essayons… et par la suite nous tirerons des conclusions.
Les katas obligatoires pour les examens de dan, pourquoi ne pas les intégrer aux examens de kyu. À petites doses, mais avec rigueur, certains éléments de katas doivent être enseignés aux « kyu ». Depuis quelques années, il existe des compétitions de katas très populaires dans certains pays. Au Canada, au Québec il n’y a pas foule. Peut-on le traduire par un manque d’intérêt ou à une lacune dans l’enseignement? Hélas, la majorité des enseignants sont des « entraineurs » avant tout, mais l’un n’empêche pas l’autre.
Les judokas qui ont terminé la période « Tai » peuvent trouver un deuxième souffle à la pratique du judo.
Nous parlons toujours du problème de nombreux membres qui désertent le judo. Nous devons leur offrir des choix, des alternatives à la compétition : les prestations techniques, une autre perception des randoris, l’auto-défense judo, l’arbitrage et les katas sont des avenues à explorer. Y sommes-nous ouverts ?
Par la pratique des katas le mot partenaire prend tout son sens. C’est un duo où l’harmonie dans la pratique entre les deux partenaires est très importante. Apprendre un kata est une chose relativement facile, mais ce n’est que la première étape. Le but ultime est de le découvrir, de le comprendre ou d’en saisir la raison d’être et le message qu’il véhicule. Il faut d’abord l’assimiler puis le « sentir », le « vivre ». Tous les katas débutent et se terminent par un salut quelque fois différent d’un kata à l’autre, mais ces saluts doivent être faits avec sincérité; bâcler ce rituel est un manque de respect envers notre discipline. Les saluts ne doivent pas être une imitation, une copie, mais exprimer sincèrement le respect que nous portons à notre partenaire ou aux personnes à qui nous présentons le kata.
Un kata n’est ni une base, ni un judo supérieur, c’est tout cela et même plus. Les katas ne sont pas des éléments complémentaires au judo, mais une partie intégrante de celui-ci. L’exécution d’un kata ne doit jamais être faite mécaniquement, sans âme. Il ne doit pas être démonstratif, mais simplement vivant, logique, tout en démontrant des principes qui régissent le judo, afin que la pratique soit bénéfique et contribue à une certaine évolution et compréhension du judo.
L’esthétique d’un kata doit être le reflet de la sincérité, de la maîtrise de techniques spécifiques et d’une parfaite communion d’esprit entre deux partenaires. Les katas n’ont pas été créés pour les divers examens de grade, mais ils sont à la disposition de ceux qui désirent élargir leurs connaissances dans la vaste sphère du budo et tout particulièrement en judo, afin de perpétuer les richesses de notre discipline.
Les éléments ci-dessous sont les points particuliers à travers lesquels il est possible d’évaluer les progrès accomplis dans l’étude des katas :
- Le SHISEI : l’attitude
- Le ZANSHIN : la concentration, l’expression
- Le KIME : la décision
- Les TAI SABAKI : les déplacements
- Les KUZUSHI : les déséquilibres
- Le calme dans la décision
- Le contrôle des actions
- L’équilibre personnel
- Le contrôle respiratoire
- La compréhension du principe d’action-réaction
- L’application pratique des principes biomécaniques reliés aux techniques
- L’aisance dans les divers « KUMI KATA» (saisies)
- La maîtrise des chutes
- La maîtrise des atemis (coups)
- L’habileté, la précision et la rapidité (dans certains cas) lors de la manipulation des armes, tel le bokken, le jo, le révolver, le tanto et finalement le katana
Je peux conclure en disant que la pratique des katas est une source intarissable pour ceux qui cherchent le perfectionnement technique et la compréhension du judo.
Les différents Katas
Les « katas » sont des suites de techniques préarrangées, codifiées. Certains katas sont composés de techniques que l’on retrouve dans le Judo moderne alors que d’autres sont issus de l’ancêtre du judo; soit le jujutsu et les nombreuses branches qui le composaient. Les katas peuvent être pratiqués à tous âges et en tout temps par les pratiquants des deux sexes.
Les katas sont divisés en deux groupes. Le premier groupe est généralement appelé le groupe des « RANDORI NO KATA ». On y retrouve le « NAGE NO KATA » (projection) créé en 1887, le « KATAME NO KATA » (contrôle) créé entre 1884 et 1887 et le « GONOSEN NO KATA » (contre prise sur attaque engagée). Ce dernier n’est pas un kata du Kodokan, mais de l’école de Kyoto. Il sert de base des « KAESHI WAZA » (contres) et s’insère bien dans ce groupe. Il est fort populaire, il a été introduit en Europe, par les premiers maîtres japonais et il est au programme d’examens de certains grades. Il faut noter que ce dernier n’est, hélas, pas ou peu enseigné de nos jours au Canada. L’ensemble de ces trois katas est relié directement au judo moderne et en représente les grands principes. Il faut toutefois regretter l’absence de techniques arrière dans le cas du « NAGE NO KATA », il manque donc une série. En outre, il est regrettable que le « KATAME NO KATA » ne soit exécuté que du côté droit. Les sorties d’immobilisation ont été codifiées, standardisées, ce qui est un progrès, toutefois, certaines techniques sont interdites et non pratiquées en randori parce que dangereuses, d’autres sont abordées, selon moi, de façon illogique. Hélas il semble qu’une révision, actualisation soit improbable.
Le deuxième groupe est composé de katas issus ou inspirés du jujutsu et de ses nombreuses composantes. Ces katas furent créés par maître Jigoro Kano et ses premiers disciples. Il faut se souvenir que plusieurs parmi ceux-ci étaient des Jujutsukas expérimentés, convertis en « judokas » et fidèles disciples de maître Kano.
Voici les principaux « katas » créés à cette époque : le « KIME NO KATA » qui fut adapté pour les judokas, mais inspiré des techniques du « DAITORYU AIKIJUTSU », une des plus anciennes écoles situées au nord du Japon. Ce kata se veut un kata de techniques de défense; une partie à genoux, illustrant bien la vie traditionnelle japonaise et une partie debout. Il se pratique en général avec un katana et un tanto; cependant, il est permis d’utiliser des répliques en bois.
Le «JU NO KATA» fut créé en 1887 par maître Kano dans le but d’apporter un élément de souplesse et de relaxation aux pratiquants. Aujourd’hui, ce kata est pratiqué par une majorité de judokas féminins. Il ne comprend aucune chute ni saisie du judogi, il peut donc être pratiqué n’importe où et apporte de bons résultats sur le plan de l’équilibre physiologique.
Le « KODOKAN GOSHIN JUTSU» est le plus récent kata puisque créé en 1956 par les experts du Kodokan, maîtres Sumiyuki Kotani, Kenji Tomiki et Minoru Mochizuki, spécialistes de l’aikijutsu; c’est pourquoi la presque totalité des techniques qui le compose sont des techniques d’aikijutsu. Ce kata s’exécute entièrement debout et comprend des attaques sur saisies, coups de pieds et de poings ainsi que des attaques avec couteau, bâton et revolver. C’est un kata très dynamique qui peut être une excellente base d’un programme d’auto-défense et au dojo peut être pratiqué à droite et à gauche. Toutefois, pour les examens et les compétitions de katas, il n’est présenté qu’à droite.
Le « KOSHIKI NO KATA» est un kata qui est issu de l’école Kito, une très ancienne école de Jujutsu dont maître Kano détenait un diplôme. C’était son kata favori. Ce kata se présente généralement en armure de samouraï; il est réservé aux hauts gradés et très peu pratiqué hors du Japon durant plusieurs années, il est maintenant au programme pour l’examen de nombreux grades.
Deux autres katas ont été créés pour la section féminine du Kodokan, soit le « KIME SHIKI» (shiki est un ancien mot qui veut dire kata) qui est une adaptation du « KIME NO KATA » et le « GOSHIN HO», qui lui est une adaptation du KODOKAN GOSHIN JUTSU.
Ces katas sont généralement précédés par une étude des déplacements du corps, TAI SABAKI, ainsi que le TENDOKU RENSHU. Il s’agit des atemis de base, au nombre de 16, qui se pratiquent selon un ordre défini, ce qui leur donne l’apparence d’un kata. Il n’est cependant pas considéré comme tel, mais entre dans la préparation préalable à la pratique des katas précités. Cette série de mouvement qui se pratique seul s’intitule le SEIRYOKU-ZENYO-KOKUMIN-TAIIKU.
L’ITSUTSU NO KATA, le kata des cinq principes… un kata créé par maître Kano hélas inachevé. Les cinq techniques qui le composent n’ont pas de nom. Très peu pratiqué et encore moins compris, c’est un héritage du maître que nous devons découvrir et interpréter individuellement.
L’URA NO KATA un autre kata de projection en contre-prise. Un kata oublié. Pratiqué et enseigné par maître Mifuné, il n’est pas au programme du Kodokan.